Il fut un temps, pas si lointain, ou son actualité relevait du fait divers, relégué parmi les scandales des dernières pages. Aujourd'hui, il occupe le devant de la scène médiatique, les journalistes se l'arrachent, lui consacrent plus qu'un oeil curieux, lui fait occuper le terrain. Son actualité éclipse jusqu'aux grands drames internationaux, jusqu'aux classiques de notre vie politique nationale. Dans les conversations, il n'est désormais plus un sujet tabou ; son audience n'est plus souterraine, elle est publiquement assumée.
Et dans ces temps troublés où se mêlent les peurs et l'exaspération, nées de cette impuissance teintée d'incompétence à répondre avec courage, vérité et lucidité, à la crise qui nous accable, il a fait son lit sur la colère et la protestation, transformant les revendications populaires en populisme primaire.
Lui bien sûr, c'est le Front National.
Les augures annoncent des scores records, appuyés en cela par des sondages, il est vrai, flatteurs, qui collent davantage au potentiel électoral du Front National, tant il est vrai que dans le passé on sous-évalua le vote FN en raison de son caractère honteux et inavouable. Les temps ont changé, décomplexée, la honte a fait place à la fierté. L'électeur FN n'est plus un skin marginal, c'est un franchouillard issu des classes dites "populaires" qui en a marre...
Il convient avant tout de lever toute hypocrisie, ce ne sont pas les médias qui ont fait la popularité du Front National, ils n'ont fait que mettre en lumière un phénomène qui prend de l'ampleur, de montée en puissance de l'extrême droite française, une montée en puissance freinée cependant par des institutions et un mode de scrutin qui bipolarise la vie politique française. Encore que de plus en plus, cette réalité tend à être de moins en moins vraie, avec des blocs qui se fragmentent de plus en plus, voire se déchirent.
Pour affronter la vérité, il convient tout d'abord de savoir l'accepter. C'est cela se responsabiliser.
Dès lors, soyons francs : avons-nous sincèrement, en France, le droit de nous plaindre de la montée du Front National, alors qu'au delà d'en être les témoins, nous en sommes les premiers responsables. La montée du FN ne vient pas d'ailleurs, mais d'ici.
Nos mouvements, dits républicains, ont ceci de commun avec le Front National, qu'ils ont pratiqué la politique dite du bouc émissaire, la recherche éperdue de cette cause extérieure, prétendument responsable de tous nos maux : l'étranger pour les uns, la finance internationale, la Chine ou encore l'Europe pour les autres, en oubliant que nous tenons souvent en nous-mêmes les réponses à nos problèmes.
C'est oublier un peu vite que le mal naît de l'inaction des hommes de bien, et qu'il a manqué aux partis de Gouvernement, lorsqu'ils étaient successivement aux affaires, et la lucidité et le courage nécessaire pour réformer notre pays lorsqu'il le fallait afin de lui permettre de mieux répondre aux exigences du monde d'aujourd'hui. Attentisme et Pesanteurs, pour beaucoup responsables de nos marasmes, ne viennent pas d'ailleurs.
Par conservatisme et protectionnisme électoral, nous avons sombré dans le déni ; le déni c'est l'oubli, la distance, l'abandon.
Contrairement, à la rumeur, celle qui empêche ou permet, c'est selon le cas, de ne pas réfléchir, ce n'est pas le Front National qui s'est emparé de thèmes dont on pense bêtement qu'ils relèvent de sa nature politique, c'est nous qui les lui avons abandonné par manque de courage et qu'il a primitivement dévié.
De ce que nous avons voulu tabou, le FN en a fait son violon d'ingres.
Nous avons laissé cheminer le Front National, parce que nos politiques se sont coupés de la réalité de ce que chacun peut vivre quotidiennement, renvoyant, entre privilèges éhontés et autres scandales, l'image d'hommes ou de femmes peu en phase avec les préoccupations de la population, qui ne sont à l'écoute ni des attentes ni des besoins de nos concitoyens avec lesquels le lien de confiance semble rompu.
Un criant manque de courage, une classe politique à la dérive, une crise qui s'installe, il n'en faut pas davantage pour instiller la peur dans l'inconscient collectif, cette peur primale, nourrie de colère qu'exacerbent les discours haineux du Front National.
La réussite du Front National, qui a su gagner le terrain de l'espace médiatique (en témoigne la couverture de son Université d'Eté), c'est avant toute chose, l'échec et la faillite des partis traditionnels.
Et aujourd'hui quelle réponse apporter à cette émergence d'une extrême droite qui se banalise et dès lors se normalise ?
Cette réponse est éminemment politique, et si en la matière, la radicalisation n'est pas une bonne chose, elle s'avère néanmoins nécessaire face aux extrêmes devant lesquels il n'est pas question de transiger. Car nul siège, nul élection ne vaut que l'on trahisse l'idéal républicain, ni que l'on galvaude les valeurs dont on se réclame.
Les élections approchant, le FN ferait peur, paraît-il. Il effraie la Gauche, car séduisant des classes populaires qui se sentent trahies, il terrorise la Droite, en pleine crise identitaire et idéologique, qui en vient à envisager implicitement des alliances de ci-de là, au gré de ses tergiversations, oubliant cette tradition républicaine, qui est l'essence même de sa dignité politique. Quant au Centre, il peine à se réunifier, même si sa position sur la question est sans équivoque.
Or, un combat contre un tel adversaire, au delà de la conviction intime et sincère qu'il y a à le mener ne saurait accepter ni la faiblesse de la peur, ni celle de la résignation.
Les considérations partisanes et électoralistes ne doivent pas entrer en ligne de compte, c'est un Front Uni qui doit se constituer pour faire face à la menace Extrême ; un front qui doit faire preuve d'audace dans ses choix, qui doit briser les tabous de questions éludées, qui doit renouer des liens solides avec la population, qui doit réformer avec cohérence, justesse et justice... Car pour vaincre les extrêmes, il faut relever notre pays.
Une question toutefois : nos politiques en sont-ils capables ? Le veulent-ils vraiment ? Le doute est permis, tant derrière certaines déclarations d'usage, les stratégies fomentées révèlent des intérêts parfois bien éloignés de l'objectif qui consisterait à renvoyer le Front National dans les abîmes de l'oubli.
Bonne analyse mais il faudrait que tous ceux qui combattent le Front National aient le courage de dénoncer la nocivité de son programme qui s'il était appliqué ruinerait la France et je constate qu'à gauche on est bien timide et qu'à droite on est plus que divisé sur l'attirude à tenir face à Marine LE PEN
RépondreSupprimerPourquoi toujours demander à nos hommes politiques de relever ce défi de combattre le front national.Comme vous le dites Mr CHARVILLAT c'est le simple citoyen qui manifeste sa colère en déclarant sa volonté de voter pour ce parti extrémiste. Alors la solution est eut être de parler, vous, moi et d'autres à ceux qui tiennent ce discours de l'impasse dans laquelle va se trouver la France et ses administrés en cas de prise de pouvoir du FN. Que la solution se trouve peut être en écoutant l'autre, en lui apportant les éléments nécessaires à sa réflexion pour lui faire comprendre que le citoyen "lambada" qui est en précarité, l'est pour des raisons que lui aussi pourrait peut être connaître un jour, qu'il ne sert a rien de jeter la pierre à celui qui est différend (couleur de peau,difficulté à s'exprimer, manque de soit disant intelligence, d'origine étrangère et surtout des pays du sud, ..). L'écoute, le conseil, l'aide, peut amener chacune de nos rencontres à l'orienter vers un chemin moins extrémiste et surtout plus constructifs pour lui et son entourage.
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