mardi 11 octobre 2011

Nicolas Sarkozy, en Campagne...

La venue du Président de la République à Aubusson a attiré la grande foule au Hall Polyvalent ; en effet, plus de 2.000 personnes s'y étaient massés pour assister au discours du chef de l'Etat sur la ruralité. Parmi les spectateurs, tout un parterre d'élus locaux d'opposition qui ont joué le jeu du respect de la fonction présidentielle par courtoisie républicaine : Michel Moine, Maire d'Aubusson, Jean-Jacques Lozach, Président du Conseil Général, les Conseillers Généraux René Roulland et Guy Avizou, notamment, ainsi que le Conseiller Régional socialiste Gérard Vandenbroucke, mais aussi des élus de la majorité présidentielle, tels que Vincent Turpinat et Nicolas Simonnet.Le Mouvement Démocrate, attentif à la teneur des propos du Président de la République, était également présent, représenté par son Président Eric Daubechies, Nathalie Pagani et moi-même, qui représentait les Jeunes Démocrates.
Accusant un certain retard, le Chef de l'Etat se présenta, escorté par le député UMP de la circonscription, Jean Auclair et plusieurs ministres du Gouvernement, afin de prononcer un discours très attendu par les creusois sur une thématique qui trouve toute sa résonnance localement. Un discours présidentiel clairement déclamé par un futur candidat à l'élection suprême de 2012, car au delà de quelques généralités consensuelles sur la question, Nicolas Sarkozy s'est fendu de quelques extrapolations afin de justifier des réformes entreprises durant son quinquennat, parmi lesquelles, notamment celle des retraites, rappellant qu'elle a permis de préserver (pour l'instant), le niveau actuel des pensions.

Nicolas Sarkozy, clairement en posture de candidat, lorsqu'avec un certain humour, ce dernier, du haut de sa stature présidentielle, ironise sur la présence de Martine Aubry dans le département, jumelant sa visite en Creuse avec la sienne, cette dernière étant soutenue par le député-maire de Guéret Michel Vergnier, venue dans le Département sur un thème analogue "Je vous ai amené du monde, c'est tellement bon d'être suivi". Un hasard curieux qui laisse à penser que la Creuse, terre rurale par excellence, a été prise en otage sur une question instrumentalisée politiquement. Assurément un coup médiatique tenté par Mr Vergnier à l'occasion de cette visite présidentielle.

Quoi qu'il en soit, le candidat Sarkozy est bien entré en campagne, fustigeant la Gauche qui "se déchaîne démagogiquement" sur la question des services publics, dénonçant l'assistanat "qui n'a pas d'avenir", précisant avec une certaine poésie que "l'on achète pas le silence de ceux qui souffrent", attaquant ses adversaires sur la question agricole, jugeant que la fonctionnarisation de l'Agriculture est dûe aux travers de la "subventionnite". Ce qui au demeurant me paraît tout à fait juste.
Pour ceux qui en doutaient, les hostilités sont bien lancées, sur le plan idéologique d'abord, sur le terrain ensuite.

Car concrètement, le Président-Candidat s'est échiné à donner une vision d'espoir aux territoires ruraux, les invitant à s'entreprendre sans céder au misérabilisme, argumentant sur des migrations de population vers les campagnes (qui peuvent aussi s'expliquer bien autrement...) qui justifieraient les politiques menées à l'égard des territoires ruraux.

Ce que certains voient comme un démentellement des services publics, lui le voit et le présente davantage comme une optimisation des services à rendre au public, préférant dès lors la mise en place d'un pôle d'excellence rurale préservant le savoir-faire séculaire en matière de tapisseries à Aubusson, qu'en sauvant  un bureau de poste par lequel transitent trois personnes par jour. Une vision qui peut se défendre au nom de la logique comptable, mais qui ne doit pas faire fî des particularismes locaux de certains territoires, mal desservis parce que cloisonnés en l'absence de voies de communication. Encore une fois, cela touche à la conception même de ruralité qui ne se décline pas de la même manière selon que l'on est à la Souterraine, irriguée par la N145, où à Crocq.
Les besoins en matière de services publics s'apprécient différemment, mais n'en sont pas moins nécessaires à l'équilibre du tissu social, et constituent un repère attractif pour les populations. Chaque cas, parce que différent doit être traité avec "pragmatisme", "bon sens", certes, mais aussi avec "Justice et Equité territoriale" Car si l'Etat ne peut pas être présent partout, il doit être présent pour tous !

Le Président de la République a évoqué comme une des principales faiblesse, et carences des zones rurales, le développement économique, insuffisant autant qu'insatisfaisant pour assurer une dynamique. Un débat récurrent à Aubusson, précédemment évoqué sur ce blog.
Nicolas Sarkozy a précisé que le socle du monde rural reposait sur l'agriculture, lui qui se félicite de la réduction des charges salariales de l'ordre de 210 millions d'Euros pour les agriculteurs, une exonération facilité par la taxe sur les sodas, visant à permettre aux agriculteurs d'être plus compétitifs sur le marché.

Mais nous ne saurions réduire la seule sphère économique des territoires ruraux à la seule agriculture ; les Pôles d'Excellence Rurale constituent également un moteur. Nicolas Sarkozy citant aussi l'exemple des points multiservices, assurant une certaine dynamique dans les villages. Mais cette image demeure par trop réductrice et généralisée.

Comme je l'ai déjà expliqué, l'Etat a un rôle structurant vis à vis du territoire, pour lui permettre un développement cohérent appuyé sur la base de ses potentialités. Le décloisonnement, sujet récurrent localement, représente pour nous un défi à relever, et si le Président de la République a cité à ce titre l'exemple de la N-145, il a par ailleurs précisé que de nouvelles infra-structures routières et ferroviaires allaient être construites pour favoriser le décloisonnement des territoires isolés, mais aussi l'accès au haut débit et à la fibre optique pour tous. Il apparaît évident que nous serons attentifs au respect de ces engagements, qui conditionnent nécessairement notre avenir.

La réussite économique passe aussi par l'emploi et la création d'emplois. A ce titre, le Président de la République a annoncé ni plus ni moins que la création d'un Centre Pénitentiaire en Creuse. Un sujet déjà évoqué dans le passé mais confirmé officiellement. Là aussi, nous serons attentifs à la réalisation finale de ce projet.
Mais l'emploi, c'est aussi la production, relocalisée. Et sur ce sujet, pas un mot, ou très peu. Pourtant les zones rurales ne sont pas vouées simplement au tourisme vert ou au résidentiel ; le Président de la République l'a rappelé sans aller plus avant sur la question, mettant en avant essentiellement le mécanisme de péréquation qui permet de dégager des moyens importants à l'égard des départements ruraux.

Au total, sur ce sujet de la ruralité, un discours cohérent, à l'idéologie marquée, bien construit, à la fois intéressant, mais aussi frustrant et réducteur. Un discours de campagne, trop marqué par certaines justifications inadéquates vis à vis du sujet.
Si nous pouvons noter des points de convergence sur le pragmatisme et le bon sens nécessaire, notamment sur le fait de ne pas identifier le territoire rural comme un lieu où le misérabilisme s'impose, mais comme un territoire d'avenir, s'il est manifeste qu'il ne sert pas de faire vivoter à coups de subvention des secteurs déjà en difficultés, mais d'encourager l'initiative, novatrice, dynamique et prospective, s'il est important de sortir de la tutelle de l'assistanat qui inhibe toute velléité, il n'en demeure pas moins des points de divergence : l'Etat doit garantir son devoir structurel et la cohésion de sa présence sur les territoires afin d'offrir à une population, qui a tendance à se sentir isolée et abandonnée, des services pour le moins nécessaires, notamment en terme d'éducation et de santé. Les réformes entreprises depuis 2007 ont eu tendance à ébranler l'équilibre du tissu social dans nos territoires, qui, pour ce qui concerne au moins la partie sud de notre département, ne gagne pas d'habitant, et qui continue de se paupériser. Les facteurs de cette paupérisation ont beau être multiples, nul ne doit fuir ses responsabilités, à quelque niveau que ce soit.
Des promesses, pas des moindres, qui peuvent conditionner l'avenir de nos territoires à court et moyen terme ont été faites. Elles devront être tenues.
Car au final, c'est le verdict de l'Histoire, seule juge de l'action humaine, qui permettra ou pas de donner de la valeur et du poids à ce discours. Car au delà des mots, si simples à agencer, ce sont les actes qui demeurent.

2 commentaires:

  1. Commentaire de Nathalie PAGANI : Répondant à l'invitation du Président de la République, non par rapprochement idéologique mais bien pour l'intérêt de la question de la ruralité, j'ai pu y voir un Nicolas Sarkosy plus candidat que représentant de tous les Français, plus diviseur que fédérateur.
    Si la vie dans nos territoires ruraux est évidemment lié au développement économique, pourquoi opposer services publics et secteur privé ? C'est oublier que l'accueil de nouvelles populations et entreprises passe aussi par la présence d'écoles, de services de santé, d'accès uniforme aux nouvelles technologies (mobile et internet), de services publics... Tout ce qui relève de l'Etat et qui a été largement mis à mal depuis 2007.
    Et que dire du manque d'ambition pour l'agriculture, certes présentée comme "le socle de la ruralité" ? Décrier la "subventionnite aigue" pour ne proposer, ensuite, que d'allouer une partie de la taxe sur les sodas à une exonération de charges sur les emplois agricoles permanents, cela ne reste qu'une nouvelle mesure conjoncturelle. Réponse partielle et légère à la crise profonde et structurelle que connaissent nos agriculteurs.

    Enfin, il est à regretter que la Creuse n'ait été, aujourd'hui, l'objet d'une partie de ping - pong entre Nicolas Sarkosy et Martine Aubry, le théâtre de la surenchère dans les promesses alors que les citoyens ont tant besoin de vérité et de rassemblement.

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  2. Mathieu CHARVILLAT12 octobre 2011 à 12:33

    Bien sûr, nous ne pouvons pas être d'accord sur tout.

    Mais il convient d'être juste dans l'analyse et de ne pas extrapoler à d'autres thèmes sur lesquelles il nous est plus évident de contester.

    La discussion est là pour nourrir le débat politique.

    En l'espèce, nous ne pouvons nous en tenir qu'à la thématique de la ruralité, sujet du discours d'hier.

    Et là dessus, force est de constater que nous ne pouvons qu'être d'accord sur certains points : ne pas céder au misérabilisme, en finir avec l'assistanat ; deux points sur lesquels l'économiste Michel Godet est intervenu aux Universités de Rentrée du MoDem.

    Nous ne pouvons pas dire le contraire tant nous contestons l'inertie de certains de nos élus locaux en la matière, et certains investissements que nous ne jugeons pas pertinents pour nos territoires.

    Ensuite bien qu'il ait évoqué certains points de notre actualité locale, il n'en demeure pas moins que le discours était très généraliste, et c'est vrai et qu'il convient d'y apporter des nuances quant à la réalité de certains particularismes locaux qui se déclinent par ailleurs chez nous, peut-être plus qu'ailleurs.
    Nous ne pouvons pas complètement acquiesser sur la question des services publics, et sur une vision économique trop réductrice qui ne fait ps la part belle au renouveau de la production sur nos territoires et la mise en avant de nos savoir faire en dépit des PER. Quid des PME dans le tissu socio-économique ?

    Mais pour ce qui est du décloisonnement, là encore force est de constater que c'est une question récurrente chez nous qui handicape notre développement. On en entend parler depuis 30 ans...

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